Par Philippe Goossens et Judith Fleuret
Le Gouvernement a déposé le 28 mars 2018 au Sénat un projet de loi visant à renforcer la lutte contre les fraudes fiscales, sociales et douanières[1].
Ce projet de loi fera l’objet d’une procédure parlementaire accélérée, promesse de campagne d’Emmanuel Macron qui avait indiqué qu’il ferait de cette procédure « la procédure par défaut d’examen des textes législatifs afin d’accélérer le travail parlementaire »[2].
Les dispositions présentées concourent à trois objectifs : « mieux détecter, appréhender et sanctionner la fraude »[3].
Ainsi, ce projet vise tout d’abord à faciliter les échanges entre les administrations concourant à la lutte contre les fraudes fiscales, sociales et douanières en renforçant notamment les pouvoirs des agents des services fiscaux, des agents des douanes ou encore des assistants spécialisés détachés ou mis à disposition par l’administration fiscale et à faciliter la transmission d’informations par les plateformes d’économie collaborative.
De plus, le projet de loi complète et alourdit l’arsenal répressif déjà existant, notamment dans une logique plus large de publicité qui, par l’effet de réputation qu’elle induit, pourrait jouer un rôle de dissuasion.
En effet, il est ainsi prévu :
N.B. le délit de fraude fiscale est à ce jour sanctionné par une peine de cinq ans d’emprisonnement et d’une amende de 500 000 euros pour les personnes physiques et 2 500 000 euros pour les personnes morales et en cas d’aggravation sept ans d’emprisonnement et 3 000 000 euros d’amende pour les personnes physiques et 15 000 000 euros d’amende pour les personnes morales.
A noter que certaines de ces sanctions ont déjà été renforcées par la loi du 30 décembre 2017.
Le montant minimal de l’astreinte pécuniaire prononcée par l’autorité judiciaire en cas de refus de communication de documents serait augmenté de 1,50 euro par jour à 150 euros par jour.
Enfin, le dernier article du projet de loi complète la liste française des Etats et territoires non coopératifs en matière fiscale en y incorporant ceux figurant dans la liste adoptée par l’Union européenne le 5 décembre 2017 (17 pays) : les transactions effectuées depuis ou vers ces Etats seront également soumises à des mesures fiscales dissuasives ainsi que des obligations et contrôles renforcés.
En revanche, aucune disposition n’est prévue concernant le fameux « verrou de Bercy » qui donnerait le monopole des poursuites pénales à l’administration fiscale en cas de fraude fiscale.
« L’objectif, c’est d’être plus efficace dans la lutte contre la fraude ». Reste à savoir si le Ministre des comptes publics sera soutenu par le Parlement lors des débats parlementaires en vue d’une adoption définitive.
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[1] Projet de loi n°385 enregistré à la Présidence du Sénat le 28 mars 2018 présenté au nom d’Edouard Philippe par Gérald Darmanin
[2] Page 27 du programme de campagne d’Emmanuel Macron
[3] Exposé des motifs au sein du Projet de loi
[4] Article 495-16 du Code de procédure pénale